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Article #185 : Le cauchemar urbain, l’exemple de Djakarta

Bidonville de Djakarta

L’année 2006 est une année historique. C’est lors de cette année que se passera le grand basculement. Pour la première fois dans l’histoire du monde, à partir de 2006, le monde comptera plus d’urbains que de ruraux ou en d’autres mots plus de gens vivant en ville qu’à la campagne. En 2030, environ 60% de la population mondiale sera urbaine.

Ci-dessous, un graphique montrant l’évolution de la proportion population urbaine/population rurale depuis 1950.

L’exode rural est l’un des phénomènes les plus importants de notre ère. Certains le voient comme un mal nécessaire devant permettre à terme un développement économique, d’autres le considèrent comme un véritable cancer rongeant progressivement notre société. L’un dans l’autre, l’urbanisation de notre monde est entrain d’atteindre des proportions devant retenir l’attention de tout le monde.

Si les pays “développés” sont passés par cette étape quasiment inévitable il y a une bonne cinquantaine d’années, c’est maintenant au tour des pays “en développement” de quitter en masse les campagnes pour rejoindre les villes en quête d’opportunités de travail.

Les chiffres de l’urbanisation dans le tiers-monde assomment par leur ampleur. En voici quelques-uns qui parleront mieux que de longs discours :

– Exode rural et taux de natalité importants ont fait naître des villes absolument gigantesques. On comptait en 1950 huit villes de plus de 5 millions d’habitants, il y en a aujourd’hui 59 dont 48 dans les pays en développement.
– Entre aujourd’hui et 2015, les villes Européennes auront une croissance d’environ 1%, celles Africaines d’environ 66%.
Les villes vont absorber 90% des 2,2 milliards d’enfants qui devraient naître d’ici à 2030.
– Environ 180.000 personnes par jour quittent la campagne pour rejoindre les villes.

Si la ville constitue pour de nombreuses personnes un symbole de liberté et d’accession au mode de vie occidental, la réalité des choses est cependant souvent bien différente pour nombre d’entre eux. Les jeunes ou moins jeunes ruraux qui abandonnent leur campagne à la recherche d’une “vie meilleure” en ville sont souvent les plus démunis et les moins éduqués. Ils étaient pauvres à la campagne, ils le deviendront vite en ville venant se rajouter aux millions vivant dans les bidonvilles de mégapoles dans des conditions misérables. 920 millions de personnes vivent aujourd’hui dans des bidonvilles, il y en aura environ 3 milliards d’ici 2050.

Autre graphique pris sur le site de la Banque Mondiale. Ce dessin montre à quel point les communautés rurales laissent progressivement la place à la pauvreté urbaine…

La violence, le terrorisme, le vol, la formation de gangs (exemple des Maras en Amérique Centrale), la guérilla, le trafic de drogue, etc. étant souvent des conséquences directes de la pauvreté urbaine, le besoin d’action est tout simplement urgent car c’est l’avenir de notre planète qui en dépend…

Lors des 3 premières années de mon tour du monde, je me suis rendu dans de nombreuses mégapoles et souvent, dans de nombreux bidonvilles. Que ce soit à Dakar, Rio, Sao Paulo ou Mexico city, les problèmes sociaux (et environnementaux) que créent l’urbanisation sont les mêmes partout.

Actuellement dans la ville de Djakarta, capitale de l’Indonésie, 4ème pays le plus peuplé au monde, je me suis rendu dans les bidonvilles de la mégapole et vous propose un petit tour d’horizon.

Djakarta est l’exemple type de ce qu’on appelle fréquemment une mégapole grandissant jour après jour. En comptant la banlieue, plus de 10 millions de personnes habitent les rues de cette ville assez peu hospitalière.

Etant en contact avec l’ONG Pelita Duaffa basée dans les quartiers du nord et faisant un fabuleux travail pour les enfants de la rue, il m’a été proposé de me rendre dans l’un des endroits les plus reculés et les plus pauvres de la ville : Cilincing.

“As tu été à l’école récemment ?”, “Depuis combien de temps ne t’es tu pas lavé les mains ?”, “Tu n’as plus d’habits à te mettre ? tu veux un T-shirt ?”, “Tu es encore enceinte toi, c’est ton 8ème, ferme tes jambes la prochaine fois“…Endara Emy, 43 ans, membre de l’association Pelita Duaffa, y met toute son énergie. Aider au développement de Cilincing est pour elle bien plus qu’un simple travail mais “sa mission sur terre et une source de bonheur“.

Ci-dessous une photo avec Endara Emy (gauche) et une professeur d’une autre école :

Grâce à ses efforts répétés depuis plusieurs années, le quartier a aujourd’hui une salle de classe, certes petite mais qui a le mérite d’exister. Celle-ci permet aux enfants du quartier d’apprendre à lire, à écrire, à compter et les bases du Coran. “Je dois jouer le rôle des parents qui eux travaillent toute la journée et ne donnent souvent pas grande importance à l’école” dit-elle en faisant des remontrances à de nombreux enfants, souvent sales, errant entre les murs étroits de ce bidonville de Djakarta.

Photo d’enfants devant la salle de classe. Nombreux sont ceux faisant l’école buissonnière faute de parents les encourageant à y aller…

Le quartier de Cilincing a une chance comparé à tant d’autres : il se situe pas loin de la mer où les moules sont nombreuses. La récolte et l’ouverture des moules est ainsi devenue l’activité numéro 1 du quartier.

Ci-dessous, quelques photos de travailleurs locaux :

Qu’ils aient 6 ans ou 80 ans, qu’ils soient enceinte de 8 mois et demi ou qu’ils soient malades…cela ne change rien, il faut travailler pour pouvoir se nourrir et parfois nourrir sa famille. Le regard de cette petite fille passant toutes ses journées à ouvrir des moules pour un salaire ridicule qui lui permet à peine de manger à sa faim en dit long sur les conditions de vie dans les bidonvilles…

Les anciennes au travail, personne n’est épargné, la notion de retraite n’existe pas par ici…

Malgré mes nombreuses expériences dans ce genre de communautés, je ne peux pas m’habituer à la vision de ces conditions de vie. Mon expérience la plus pesante de ma journée restera sans doute la vision de cette dame, d’environ 60 ans, abandonnée de ses enfants et handicapée. Ne pouvant bouger, elle est depuis plus de 5 ans sur son lit complètement inactive. Malgré le fait que certains voisins viennent lui apporter une soupe tous les jours, “elle attend la fin de ses jours” me confiera un membre de l’association m’accompagnant…Triste…

Les scènes de vie difficiles se succèdent devant mes yeux les unes après les autres et me font poser de nombreuses questions quant au devenir de notre planète. Y a t-il un espoir de rendre un jour ces villes “vivables” ??? J’ose l’espérer. Voir le travail fourni par de nombreuses ONG est en tout cas une belle source d’encouragement.

Je n’ai, dans cet article, pas évoqué les problèmes environnementaux, liés à l’urbanisation. Je développerai ce sujet dans une prochaine brève lorsque je serai en Chine.

Pour terminer, une petite photo d’enfants au bord de l’eau…

A bientôt.

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